4 novembre 2007

Mondialisation et emploi

" La communauté économique mondiale et les décideurs dans les gouvernements et les institutions internationales n'ont pas encore bien compris la transformation économique la plus importante de cette période de mondialisation : le doublement de la force de travail mondiale ", assène Richard Freeman, professeur à Harvard. S'appuyant sur les données de l'Organisation internationale du travail (OIT), il montre qu'avec l'arrivée de la Chine, de l'Inde et de l'ex-URSS dans le capitalisme contemporain, l'offre de travail à disposition sur le marché mondial est passée d'un milliard et demi de personnes à quasiment trois milliards. Un doublement. Ces nouveaux arrivants ont apporté une main-d'oeuvre industrielle à bas prix : le coût horaire moyen d'un salarié de l'industrie était à 23 dollars aux Etats-Unis en 2004, 30 dollars dans la zone euro, un peu plus de 8 dollars dans les pays émergents d'Asie de première génération (Corée du Sud, Hongkong, Singapour, Taiwan), 3 dollars au Brésil et... moins d'un dollar en Chine et en Inde. Dans ce dernier pays, un ingénieur débutant dans le secteur des télécoms coûte 7 000 euros... par an. Certes, un paysan chinois ou un jeune diplômé indien offre un niveau de productivité plus faible qu'un salarié qualifié du Nord. Mais il est tout de même suffisant pour produire de manière compétitive, compte tenu des salaires pratiqués. De quoi répondre aux exigences des entreprises des vieux pays industrialisés qui souhaitent délocaliser une partie de leur production ou sous-traiter des services informatiques ou encore développer une offre locale. Cette concurrence alimente alors une forte pression sur les marchés du travail, un peu partout dans le monde. Perdants et gagnants au Sud Les pays du Sud qui se sont spécialisés dans l'industrie textile pour assurer leur insertion internationale ont vite compris, après la suppression des quotas textiles internationaux au 1er janvier 2005, la puissance de la déferlante chinoise et indienne. Le Maghreb, l'Amérique centrale et la Corée du Sud ont le plus souffert de la situation, fortement concurrencés par l'offre de vêtements, de tissus et de fils en provenance de Chine, d'Inde, mais aussi du Bangladesh ou du Sri Lanka." L'habillement est une industrie légère où le coût salarial, de 20 % à 35 % des coûts totaux, est important pour la compétitivité. Cela donne un avantage à la Chine, où le salaire horaire est de 0,25 euro, contre 1,2 en Turquie, 0,7 en Tunisie, 0,5 en Roumanie ", explique Jean-Raphaël Chaponnière, expert de l'Agence française de développement (1).

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